Dostoïevski avait écrit : " Si Dieu n'existait pas, tout serait permis ". C'est là le point de départ de l'existentialisme. En effet, tout est permis si Dieu n'existe pas, et par conséquent l'homme est délaissé, parce qu'il ne trouve ni en lui, ni hors de lui une possibilité de s'accrocher. Il ne trouve d'abord pas d'excuses. Si, en effet, l'existence précède l'essence, on ne pourra jamais expliquer par référence à une nature humaine donnée et figée ; autrement dit, il n'y a pas de déterminisme, l'homme est libre, l'homme est liberté. Si, d'autre part, Dieu n'existe pas, nous ne trouvons pas en face de nous des valeurs ou des ordres qui légitimeront notre conduite. Ainsi, nous n'avons ni derrière nous, ni devant nous, dans le domaine lumineux des valeurs, des justifications ou des excuses. Nous sommes seuls, sans excuses. C'est ce que j'exprimerai en disant que l'homme est condamné à être libre. Condamné, parce qu'il ne s'est pas créé lui-même, et par ailleurs cependant libre, parce qu'une fois jeté dans le monde il est responsable de tout ce qu'il fait. L'existentialiste ne croit pas à la puissance de la passion. Il ne pensera jamais qu'une belle passion est un torrent dévastateur qui conduit fatalement l'homme à certains actes, et qui, par conséquent, est une excuse. Il pense que l'homme est responsable de sa passion. L'existentialiste ne pensera pas non plus que l'homme peut trouver un secours dans un signe donné, sur terre, qui l'orientera ; car il pense que l'homme déchiffre lui- même le signe comme il lui plaît. Il pense donc que l'homme, sans aucun appui et sans aucun secours, est condamné à chaque instant à inventer l'homme.
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El existencialismo es un humanismo (1945)
Dostoievsky escribe: "Si Dios no existiera, todo estaría permitido." Éste es el punto de partida del existencialismo. En efecto, todo está permitido si Dios no existe y en consecuencia el hombre está abandonado, porque no encuentra ni en sí ni en fuera de sí una posobilidad de aferrarse. No encuentra ante todo excusas. Si en efecto la existencia precede a la esencia, no se podrá jamás explicar por referencia a una naturaleza humana dad y fija; dicho de otro modo, no hay determinismo, el hombre es libertad. Si, por otra parte, Dios no existe, no encontramos frente a nosotros valores u órdenes que legitimen nuestra conducta. Así, no tenemos ni detrás ni delante de nosotros en el dominio luminoso de los valores, justificaciones o excusas. Estamos solos, sin excusas. Es lo que expresaré diciendo que el hombre está condenado a ser libre. Condenado, porque no se ha creado a sí mismo, y sin embargo, por otro lado, libre, porque una vez arrojado al mundo es responsable de todo lo que hace. El existencialista no cree en el poder de la pasión. No pensará nunca que una bella pasión es un torrente devastador que conduce fatalmente al hombre a ciertos actos y que por consecuencia es una excusa; piensa que el hombre es responsable de su pasión. El existencialista tampoco pensará que el hombre puede encontrar socorro en un signo dado sobre la tierra que la oriente; porque piensa que el hombre descifra por sí mismo el signo como lo prefiere. Piensa, pues, que el hombre, sin ningún apoyo ni socorro, está condenado a cada instante a inventar al hombre.